Octobre
Dimanche après-midi.
« Seul un début d’automne peut donner cet éclairage particulier… » se dit Lou-Anne. Lyon, dans la vitre de l’abribus, se trouble du défilement continu de voitures sur le quai. Mais l’image remplace le gris sale de l’Hôtel-Dieu au bord de l’axe routier : la mine du Crayon et les autres tours dépassent derrière un pâté de maisons bourgeoises ; au premier plan, des arbres encore verts et touffus habitent l’espace, un morceau de pont s’enfuit sur le côté et une péniche rouge et blanche s’anonchalit à quai.
Au parc, Lou-Anne zigzague entre les barrières de travaux et les fans de rollers, prend les chemins au feeling et s’éloigne de ses habitudes. Quittant la Tête d’Or, elle s’approche de la soucoupe imaginée par Renzo Piano et découvre, sous l’aile, un bassin et un banc. Là, dans une rumeur automobile incessante, Lou-Anne relit Verlaine.
[..]
Revenue chez elle, après une tranche de cake et un coca avalés dans l’agitation du cinéma, Lou-Anne écrit au style vert sur papier jaune vif :
Sur un banc public
Au soleil, relire Verlaine,
Plaisir unique.
Extrait de La voleuse, éditions du Poutan, octobre 2015.